Aujourd’hui, joie dans la communauté sino-mongole de Rennes : l’OFPRA vient d’accorder le statut de réfugiés à une famille. C’est suffisamment rare pour être signalé, et fêté dignement. Joie aussi chez les militants qui accompagnent cette famille depuis plusieurs mois. Bienvenue à nos nouveaux concitoyens pour qui une nouvelle vie commence. Mais … comment cette famille pourra-t-elle tourner la page de la période qu’elle vient de traverser ? Entrée en France en juin 2011, madame a accouché à Rennes d’un petit garçon le 11 juillet 2011. Et dès sa sortie de la maternité, a commencé une vie d’errance, appelant chaque jour le 115, jamais assurée d’avoir une place, déménageant tous les 3 jours, dormant parfois dans sa voiture avec son nouveau-né, de plus en plus souvent au fur er et à mesure que l’enfant grandissait. D’autres bébés étaient nés après lui, d’autres situations dramatiques s’étaient déclarées, et un “grand” de 2 mois doit laisser sa place, n’est-ce-pas ? Monsieur, très fatigué par son diabète, maigrissait à vue d’œil et s’épuisait de plus en plus. Ils ont fini par s’installer dans un squat surpeuplé. Dans un grenier glacial en hiver, étouffant en été. Sous le regard désespéré mais impuissant de l’assistante sociale qui suit d’autres familles voisines qui, elles, ont eu la chance d’être intégrée à un dispositif social.
Dans ce squat, la famille a connu la solidarité de quelques militants rennais épuisés et débordés. Elle a surtout connu la chaude solidarité de compatriotes faisant face avec beaucoup de dignité à la même situation. Ce qui fait qu’aujourd’hui, statut de réfugiés en poche, elle a à peine commencé à apprendre le français, qu’elle ne connaît de la France et de sa culture que la débrouille et le système D pour survivre. Et elle va bientôt connaître le stress d’une expulsion quand le squat qui leur a servi de refuge va être fermé.
Certes aujourd’hui une nouvelle vie commence pour eux. Ils vont toucher le RSA, suivre une formation linguistique puis professionnelle, attendre l’attribution d’un logement social. S’installer dans l’exil. Découvrir de nouvelles difficultés. Sans doute deviendront-ils Français dans quelques années. Mais oublieront-ils l’accueil qui leur a été réservé en France et les conditions de vie qui leur ont été imposées au moment où ils arrivaient plein de confiance demander l’asile après les traumatismes vécus dans leur pays et qui sont aujourd’hui reconnus par l’OFPRA ? Est-ce la meilleure façon pourla France d’accueillir et d’intégrer ses nouveaux citoyens ? Ils sont jeunes, courageux, ils vont apprendre le français et travailler. Mais oseront-ils un jour raconter à leur enfant, qui n’aura pas d’autre pays que le France, comment il a vécu sa première année de vie ?
Armelle Bounya.